À retenir
Voici les principaux points à retenir pour les lecteurs qui n’ont que quelques minutes.
Présentation : la période d’aversion pour le risque. Les effondrements cycliques sont intégrés à la structure typique des fonds de capital-risque qui ont un cycle de vie de 10 ans, car ils sont plus susceptibles de survenir que non au cours de cette période. Plutôt que de comporter des hausses et des baisses uniformément réparties, ce caractère cyclique prend la forme d’une hausse progressive (appelée période d’appétit pour le risque, où les investisseurs allouent leur capital librement), suivie par un effondrement brusque et abrupt (appelé période d’aversion pour le risque, où les investisseurs s’abstiennent de déployer des fonds en raison de l’incertitude des marchés). La conclusion de notre marché haussier imprévisible a été le moment catalyseur qui a tiré notre écosystème de capital-risque d’une période d’investissement de dix ans marquée par l’appétit pour le risque et l’a plongé dans le marché de 2022, marqué par l’aversion pour le risque.
- La puissance des taux. Au cours des 18 derniers mois, l’évaluation finale des sociétés de logiciels lors de leur liquidation a chuté d’environ 70 %. Comme les actifs technologiques et les actifs de croissance sont très sensibles aux hausses de taux, particulièrement les sociétés qui utilisent des liquidités et dont la rentabilité est prévue dans de nombreuses années, une augmentation des taux de 1 % peut entraîner une baisse des évaluations de 15 à 20 %. Comme le taux directeur de la banque centrale a déjà augmenté de 350 points de base et qu’il devrait dépasser 4,00 % lors de l’annonce finale du taux de la Banque du Canada, le 7 décembre 2022, il est possible que la détérioration des évaluations de notre écosystème ne soit pas terminée.
- La distorsion des notations croisées. Pendant la durée du marché haussier imprévisible, certains investisseurs avertis en fonds de couverture ont introduit leurs réserves de capitaux dans notre écosystème de capital-risque afin d’arbitrer l’écart des évaluations entre les sociétés ouvertes et privées en phase de capital-risque tardif. Le rythme et l’ampleur du déploiement de capitaux qu’ont maintenu ces investisseurs ont fait de notre écosystème privé un écosystème de stratégie indicielle, où le contrôle diligent et les bases de l’économie étaient éclipsés par la rapidité et les évaluations. Ceux qui ont profité de ce tourisme des capitaux ont maintenant une pente abrupte à remonter.
- Les fonds à grande capitalisation produisent de grandes marges bénéficiaires. Compte tenu de la vigueur des marchés public et privé au cours des deux dernières années, les associés commanditaires et commandités ont établi un nombre record de fonds à grande capitalisation (c.-à-d. dépassant 250 M$). Cela a augmenté la vitesse avec laquelle les associés commandités déployaient le capital dans les sociétés. Comme les fonds à grande capitalisation exigent des évaluations et des marges bénéficiaires théoriques plus élevées pour justifier la quête de financement subséquente des associés commanditaires(c.-à-d. un ratio de la valeur totale au capital versé plus élevé), certaines sociétés de notre écosystème ont été largement surévaluées, ce qui a donné naissance à une culture de chasse à l’évaluations au sein de notre marché haussier imprévisible.
- Le début du nettoyage des évaluations. Contrairement aux marchés publics où les évaluations évoluent dans les deux sens, les incitatifs structurels de l’ensemble de l’écosystème du capital-risque privé ont fait naître des attentes à l’égard d’une hausse continue des évaluations (c.-à-d. que plus le tour de financement est avancé, plus l’évaluation est importante). Ce phénomène a fait naître une perception négative à l’égard des tours de financement à la baisse. Si l’on se penche sur les 18 prochains mois, lorsque les sociétés qui ont atteint des sommets en 2021 se lanceront de nouveau sur le marché, les obstacles structurels qui incitent notre écosystème à ne pas accepter de tours de financement à la baisse justifiés par les bases de l’économie et le rendement des sociétés seront inévitablement mis à l’épreuve.
Introduction
Il existe un phénomène fascinant qui fait en sorte que les effondrements cycliques sont intégrés à la structure de l’écosystème du capital-risque, c’est-à-dire qu’un fonds dont le cycle de vie est de 10 ans est plus susceptible de subir un ralentissement au cours de cette période que le contraire. Comme nous l’avons vu en 2022, lorsque cela se produit, cela perturbe complètement l’allocation du capital, les méthodes d’évaluation et la tarification du marché. Cette nature cyclique n’est pas composée de hausses et des baisses réparties de façon uniforme. Elle comporte plutôt une hausse progressive sur une longue période, suivie d’un déclin brusque et abrupt. La hausse graduelle au cours de laquelle les investisseurs connaissent des vents macroéconomiques favorables, investissent librement le capital engagé par les associés commanditaires et prennent de plus en plus de risques est connue sous le nom de période d’appétit pour le risque. La période d’aversion pour le risque est un choc brusque pour le marché, qui se produit au cours des récessions économiques, alors que les investisseurs repartent tout droit dans la direction opposée et constatent, au départ, une importante destruction de valeur au sein de leurs portefeuilles du secteur public.
Pour notre écosystème de capital-risque, la période d’appétit pour le risque a eu lieu entre 2009 et 2022, lorsque les taux demeuraient presque nuls, que l’inflation était prévisible et que les titres de cette catégorie attiraient des investissements institutionnels plus importants (de la part de caisses de retraite, de fonds souverains, de fonds de dotation, etc.). La période d’aversion pour le risque a été déclenchée au début de 2022, sous l’influence du contexte macroéconomique actuel. Comme l’imprévisible marché haussier des deux dernières années a constitué le dernier chapitre du pic de notre période d’appétit pour le risque, c’est aussi à ce moment que les sociétés de capital-risque