À retenir

Voici les principaux points à retenir pour les lecteurs qui n’ont que quelques minutes.

  1. Les licornes commencent à se multiplier comme des chiens d’élevage. Tandis qu’en 2013, nous n’avions que 39 licornes au total, la seule année 2021 a donné naissance à plus de 500 de ces sociétés. Le terme a été adopté pour désigner des entreprises dont la rareté évoquait des créatures mythiques, mais nos licornes sont devenues aussi communes que les animaux de compagnie. La génération de 2021 est connue pour être la plus affamée (la plus consommatrice de capitaux) et aussi la plus jeune (la plupart ont été créées dès les premiers tours de financement) de tous les temps.
  2. L’expression “à tout prix” a été interprétée de façon trop littérale. Notre écosystème technologique s’est inspiré du plan de “croissance à tout prix” des toutes premières licornes. Et dans un environnement macroéconomique porteur, les entreprises s’en sont donné à cœur joie pour brûler et mobiliser de plus en plus de capitaux – le tout avec des valorisations grandissantes. Cette frénésie a mis en évidence de nombreuses pratiques commerciales contraires à l’éthique de la part d’entreprises empressées de croître à tout prix, littéralement.
  3. BNPL = Achetez maintenant et payez plus tard. Avec plus de 8 milliards de dollars de capital-risque accumulés en 2021 et une centaine d’acteurs en existence dans le monde, le secteur s’est envolé lors de l’imprévisibilité du marché haussier. Le modèle a tiré profit de la croissance du commerce électronique grand public, des taux proches de zéro, de la faible inflation et de l’expansion de la catégorie. Malheureusement, bien que le secteur ait réussi à prospérer dans un environnement macroéconomique solide, le modèle BNPL (“Achetez maintenant et payez plus tard” de l’anglais buy now, pay later) n’a pas encore fait ses preuves, et il pourrait bientôt se heurter à une consolidation massive.
  4. La livraison à la demande n’a plus le vent en poupe. Bien que la pandémie ait imposé de nouvelles pratiques de livraison pour les produits d’épicerie, la catégorie de la livraison à la demande n’a pas encore fait ses preuves en tant que modèle rentable. S’ils n’ont pas accès à une montagne de budget publicitaire pour séduire les consommateurs, les investisseurs se rendent compte que livrer un seul avocat en moins de 15 minutes n’est peut-être pas aussi lucratif qu’ils le croyaient.
  5. À fond dans le nuage. L’imprévisibilité du marché haussier a accéléré la transition du monde entier vers le numérique. Or, ce secteur repose entièrement sur l’infonuagique, que ce soit pour les logiciels ou les infrastructures. Tandis que la dernière décennie s’est concentrée sur les logiciels en nuage, la prochaine s’intéressera davantage à la sécurité et aux infrastructures de données infonuagiques. Compte tenu du taux de pénétration étonnamment faible de l’infonuagique dans le secteur informatique, de sa résilience économique naturelle et de sa capacité à contrer l’inflation, l’avenir de cette technologie ne pourrait pas être plus brillant.

Introduction

En 2013, Aileen Lee a publié un article dans TechCrunch intitulé “Welcome to the Unicorn Club: Learning From Billion-Dollar Startups”[1]. Depuis, notre écosystème technologique s’est lancé à l’unisson dans la création de sociétés privées évaluées à plus d’un milliard de dollars. Ce type d’entreprise répond au principe de la rareté, à l’image de la licorne. En 2013, il n’y avait que 39 licornes (qui représentaient à peine 0,07 % de toutes les sociétés de capital-risque financées entre 2003 et 2013)1. À présent que le monde constate que les licornes d’autrefois sont devenues des entreprises solides et cotées en bourse – comme Uber, Snapchat, Slack, Shopify et Airbnb –, tous les entrepreneurs, employés ou investisseurs se donnent pour mission de les imiter. Le rêve de devenir “le prochain Uber” ou le “Shopify pour [insérer ici]” a pris le dessus.

Cela soulève la question suivante : quel était exactement le plan de croissance des licornes, et comment les entreprises peuvent-elles les répliquer dans leur esprit et leur exécution ? La réponse se résume à quelques idées clés :

  1. S’adresser à un marché potentiel total d’une taille colossale, à potentiel de croissance élevé et qui ne sera jamais saturé.
  2. Miser sur la vitesse pour s’emparer du marché, tout en privilégiant la croissance des revenus (c.-à-d. les acquisitions, les opérations, la valeur brute des marchandises).
  3. Exploiter le capital disponible sur le marché pour faire face à la concurrence et croître plus rapidement, en investissant dans tous les aspects de l’entreprise.

Autrement dit, le plan fondamental que notre écosystème technologique a suivi au cours de la dernière décennie, et qui est illustré par l’image d’une licorne se démarquant des autres entreprises, est celui de « la croissance à tout prix ». Au vu du succès des licornes, concentrées sur la conquête du marché et armées de capitaux redoutables, les investisseurs ont commencé à considérer la croissance comme le premier facteur de valorisation. Cet état d’esprit a ricoché tout au long du spectre, et maintes sociétés privées ont mis en place leurs propres stratégies de croissance éclair. Bien que l’idée d’imiter certains aspects de ces plans soit venue des fondateurs des sociétés, les employés, les investisseurs et les commanditaires se sont également mobilisés, encouragés par des incitatifs structurels. L’accent spécial placé sur la croissance a conduit à un accroissement de la valorisation privée :

  • Les régimes de rémunération des employés (y compris les options d’achat d’actions et les unités d’actions ordinaires) font monter les valorisations
  • Les actions et la valeur nette des fondateurs font monter les valorisations
  • La valeur des portefeuilles de sociétés en nom collectif et les ratios de la valeur totale au capital versé font monter les valorisations
  • Les prévisions de rendement et la valeur des portefeuilles des commanditaires font monter les valorisations

Les sociétés de technologie privées ont tiré parti de ces plans de croissance pour amasser plus de capitaux lors des tours de financement ultérieurs, sur la base de valorisations plus élevées. De ce fait, beaucoup ont estimé que le statut de licorne était à leur portée. Le parcours visant à devenir une licorne a été bien intégré par le secteur privé de la technologie :

Augmenter le capital et le dépenser dans une optique de “croissance à tout prix”. Douze mois plus tard, solliciter de nouveau le marché, obtenir une plus forte valorisation et du capital supplémentaire, et le brûler sans pitié. Si vous vous en tenez à ce plan, votre rêve de devenir une licorne se réalisera très bientôt.

Malheureusement, cette stratégie fondée sur la croissance, généralement acceptée par les fondateurs aussi bien que par les investisseurs du marché, a conduit de nombreuses sociétés à déployer des pratiques contraires à l’éthique.

  • En 2015, la société Zenefits de Parker Conrad a été reconnue coupable d’avoir manipulé le système de délivrance des permis d’assurance de l’État et enfreint la réglementation, après avoir amassé 580 millions de dollars pour une valorisation de 4,5 milliards de dollars[2]
  • En 2018, Elizabeth Holmes a été reconnue coupable de tromper les investisseurs quant à l’exactitude des analyses sanguines de Theranos, après avoir amassé 700 millions de dollars pour une valorisation de 10 milliards de dollars3 (elle a récemment été condamnée à 11 ans de prison).
  • En 2019, Adam Neumann a été soupçonné de mauvaise gouvernance d’entreprise et de pratiques de gestion douteuses à la suite de l’introduction en bourse de sa société WeWork, après avoir amassé 10 milliards de dollars auprès de Softbank pour une évaluation de 47 milliards de dollars[4].
  • Ce seul dernier trimestre, la haute direction de Twitter a été accusée de duper son propre conseil d’administration en ne rendant pas compte des vulnérabilités de la société en matière de sécurité, et en présentant des données trompeuses et aléatoires pour donner une fausse impression de progrès (c.-à-d. de croissance).[5]

Bien qu’il soit facile de rejeter la faute sur les sociétés, les forces macroéconomiques de notre précédent cycle de marché, qui ont contribué à la généralisation des plans de “croissance à tout prix”, sont tout aussi coupables. L’écosystème a profité de toute une décennie haussière marquée par des taux d’intérêt bas, une inflation maîtrisée, une solide confiance des consommateurs, un taux d’emploi élevé, une meilleure répartition des fonds privés de la part des commanditaires institutionnels, un plus grand dynamisme des investisseurs de capital-risque, et un marché conscient de la prédominance de la technologie dans l’économie du futur. Dans le contexte du rebond exceptionnel lié à la pandémie, une tempête macroéconomique a éclaté à point nommé pour que notre écosystème amène ce plan à un niveau que nous n’aurions jamais imaginé.

En 2021, non seulement notre écosystème s’est montré particulièrement fertile pour donner naissance à des licornes, mais les niveaux records de capitaux amassés et de fonds de capital-risque déployés ont aussi fait de cette génération de licornes la plus affamée de tous les temps. Compte tenu de l’augmentation des capitaux mis à la disposition des sociétés et des incitatifs offerts à toutes les parties prenantes, prêts à être dépensés le plus rapidement possible afin de conquérir le marché selon des critères de revenus, les niveaux records de consommation du capital sont devenus la norme. Et ce qui est encore plus remarquable dans la génération de 2021, c’est quand nous comparons le nombre de licornes nées dès les premiers tours de financement (à l’issue de tours de financement au démarrage de série A ou B), qui s’élève à 109[6], au nombre total de licornes nées deux ans plus tôt en 2019, à savoir 106.

Bien qu’en théorie, les licornes n’appartiennent pas à des secteurs particuliers, depuis 2021 plus de la moitié d’entre elles font partie des secteurs de la technologie financière, du commerce de détail électronique ou des technologies infonuagiques[8]. Rien qu’aux États-Unis, ces thèmes ont permis d’accumuler plus de 173 milliards de dollars d’investissements en capital-risque au cours des deux dernières années, dont 120 milliards de dollars en 2021[9]. Pour mieux comprendre comment les sociétés de ces trois thèmes ont tiré parti de leurs propres plans axés sur la croissance, et comment elles se trouvent à présent positionnées pour se développer au-delà de 2022, allons au fond des choses.

Technologie financière

Aux États-Unis, les investissements de capital-risque dans des sociétés de technologie financière se sont élevés à 35 milliards de dollars en 2021, soit une augmentation de 94 % par rapport à 2020. Le secteur des paiements ayant connu sa plus forte croissance d’une année sur l’autre (doublant pour atteindre +8 milliards de dollars), un sous-secteur au sein de ce secteur qui représente 8 billions de dollars a retenu toute l’attention des consommateurs et des investisseurs au cours de ces deux dernières années, celui de l’offre Achetez maintenant et payez plus tard (BNPL).

Le modèle BNPL, version moderne de l’affacturage des créances clients, a fourni aux détaillants un nouveau piège qui consiste à proposer aux consommateurs la possibilité de payer des produits et des services en concluant un prêt sans intérêt. Les fournisseurs d’offres Achetez maintenant et payez plus tard auraient structuré des ententes avec les commerçants, selon lesquelles ils percevraient une commission de 4 % prélevée sur le prix de vente au détail (ce qui revient à facturer 4 % de frais aux commerçants), et une fois l’achat réalisé, ils assumeraient entièrement le risque de non-remboursement correspondant aux 96 % restants.

L’exemple ci-dessus décrit la première façon dont les fournisseurs d’offres Achetez maintenant et payez plus tard tirent parti du plan de croissance à tout prix. En exploitant la psychologie des consommateurs et en leur vendant une expérience fluide vers une satisfaction immédiate (leur permettant de réaliser des achats qu’ils ne pourraient pas s’offrir autrement), les fournisseurs d’offres Achetez maintenant et payez plus tard détournent l’attention des consommateurs de l’élément clé de leurs activités : fournir des microprêts. En se basant sur les chiffres d’Affirm (société cotée en bourse et chef de file du secteur), leurs revenus nets minorés des frais liés aux opérations ont représenté 4,3 % de la valeur brute des marchandises pour l’exercice 2022[11]. Ce pourcentage souligne les marges infimes de ce modèle d’affaires et sa dépendance à un fort volume de ventes pour générer des rendements intéressants. Pour atteindre le volume nécessaire, les fournisseurs d’offres Achetez maintenant et payez plus tard partagent tous les mêmes outils de croissance visant à faire progresser leurs chiffres d’affaires, la valeur brute des marchandises, et le nombre de leurs commerçants et de leurs consommateurs :

  1. Négocier des partenariats avec des distributeurs pour tirer profit des volumes de vente existants
  2. Investir dans un processus de paiement fluide et optimisé pour la conversion
  3. Lancer des campagnes intensives pour se faire connaître auprès du grand public
  4. Développer une marque moderne pour attirer l’attention des jeunes
  5. Accélérer le procédé de vérification des crédits non bancaires pour éliminer tout obstacle à l’admissibilité au crédit

Ce dernier point est très important. En accélérant le procédé de vérification habituel des crédits, les fournisseurs d’offres Achetez maintenant et payez plus tard renoncent à comprendre si leurs clients en ont réellement les moyens, ainsi qu’à collaborer avec les organismes de réglementation et les agences d’évaluation du crédit sur l’information de crédit (c.-à-d. qu’une banque pourrait accorder un prêt hypothécaire à un client sans avoir connaissance des 50 prêts que celui-ci a en cours auprès des fournisseurs d’offres Achetez maintenant et payez plus tard).

L’environnement macroéconomique des deux dernières années a joué un rôle décisif dans la démocratisation de l’usage de l’offre Achetez maintenant et payez plus tard. Il a également contribué au développement de ce secteur qui rassemble plus de 100 fournisseurs indépendants12.

  1. Essor du commerce électronique de masse : les périodes de confinement continu, la vie dans des zones éloignées des commerces, le télétravail et les aides gouvernementales résultant de la pandémie ont créé des circonstances parfaites pour accélérer l’adoption du commerce électronique. Ces facteurs ont fortement stimulé la croissance du secteur de l’offre Achetez maintenant et payez plus tard en la multipliant par plus de 3 en trois ans, portant la valeur brute des marchandises de 33 milliards de dollars en 2019 à plus de 120 milliards de dollars en 2021[12].
  2. Taux d’intérêt extrêmement faibles : comme les fournisseurs d’offres Achetez maintenant et payez plus tard comptent sur des agents de prêts externes pour fournir des prêts à leurs consommateurs, l’ensemble du modèle fonctionne avec des taux proches de zéro qui transforment les offres Achetez maintenant et payez plus tard en un piège irrésistible, en comparaison avec les 2 à 3 % de frais demandés par les sociétés de carte de crédit concurrentes. Ce type de formule a permis de multiplier par 8 le nombre de commerçants travaillant avec Affirm, passant de 29 000 en 2020 à 235 000 en 2021[11].
  3. Inflation faible : compte tenu d’un pouvoir d’achat en hausse grâce à une inflation faible, les ménages ont réussi à augmenter le montant de leur revenu discrétionnaire pour toutes leurs dépenses, favorisant encore davantage la croissance du commerce électronique.
  4. Prolifération des offres Achetez maintenant et payez plus tard : Autrefois réservées à l’achat de produits coûteux et haut de gamme, les offres Achetez maintenant et payez plus tard se sont généralisées à l’ensemble des achats courants des consommateurs. Aussi bien dans les factures d’électricité que dans les dépenses d’assurance maladie, d’entretien automobile, de voyages et d’alimentation, les offres Achetez maintenant et payez plus tard se rencontrent dans pratiquement toutes les catégories de dépenses de consommation discrétionnaire, permettant de capturer un plus grand volume d’activité.

Malheureusement, sur l’année 2022, les fournisseurs d’offres Achetez maintenant et payez plus tard ont été victimes à l’échelle mondiale de leur forte dépendance à l’égard d’un environnement macroéconomique anormalement favorable et du mandat de croissance à tout prix qui régit nos écosystèmes. Compte tenu de l’inflation record qui continue de mettre à mal l’économie, la croissance perpétuelle du commerce électronique qui prévalait en 2021 s’est interrompue. Avec la diminution du revenu discrétionnaire en raison de la baisse du pouvoir d’achat et de la hausse du coût de la vie, les ménages ont été forcés de revoir leurs anciennes habitudes de consommation et de réduire leur niveau de dépenses.

La hausse des taux d’intérêt devant se poursuivre, il sera beaucoup plus compliqué pour les commerçants de justifier des taux de commission plus élevés compte tenu de la baisse des volumes prévue. Par ailleurs, les cas de consommateurs endettés ont déjà commencé à se multiplier. Avec une demande qui a atteint des niveaux records, Affirm a augmenté la part de ses prêts à risque élevé (ceux présentant une cote de crédit inférieure à 90 ou une absence de cote dans son système privé ITAC) de 3 % en décembre 2020 à 12 % un an après seulement[13].

À la suite d’ajustements apportés par la société à ses critères de souscription, Affirm a annoncé des taux de défaillance oscillant autour de 2,5 % et des radiations nettes totalisant 70 millions de dollars pour l’exercice 2022, soit 7 fois plus qu’en 2021 et plus de 30 fois qu’en 2020[13]. Au final, le fait que 41 % des consommateurs utilisant les offres Achetez maintenant et payez plus tard ont des profils de crédit hors normes et 27 % des profils de crédit à risque élevé (en comparaison avec respectivement 12 % et 13 % seulement pour la population en généra[14]) n’a pas amélioré les perspectives du secteur.

À mesure que des concurrents comme Apple et d’autres grandes institutions financières mettent en place leurs propres offres Achetez maintenant et payez plus tard[15], le secteur court le risque de devenir un simple outil au sein d’un éventail d’options de paiement plus large. Comme vous le savez, lorsque des sociétés monolithiques sont contraintes de se mesurer à des plateformes, la bataille devient très difficile à gagner pour elles (pensez à Slack et Teams ou Zendesk et Salesforce). À l’avenir, afin d’éviter des dépréciations en masse et des regroupements d’entreprises difficiles, le secteur des offres Achetez maintenant et payez plus tard sera forcé de démontrer que son modèle d’affaires peut drainer efficacement des capitaux dans des environnements macroéconomiques qui ne reposent pas sur des taux d’intérêt faibles, une inflation prévisible et une croissance élevée.

Technologie du commerce de détail et vente au détail

Les investissements mondiaux de capital-risque dans des sociétés de technologie du commerce de détail ont dépassé 109 milliards de dollars en 2021, soit une augmentation d’une année sur l’autre de 132 % par rapport aux 47 milliards de dollars réalisés en 202016. Bien que le commerce de détail a représenté la majeure partie de ces investissements, soit 54 milliards de dollars, c’est le sous-secteur des services de livraison à la demande qui arrive en première position en matière de taille moyenne des opérations, en atteignant 106 millions de dollars[16] (soit deux fois plus que celle du sous-secteur arrivant en deuxième position), et qui a profité des prises de risque accrues sur le marché privé pendant cette période d’imprévisibilité du marché haussier.
Les sociétés de services de livraison à la demande, qui ont représenté 25 milliards de dollars (soit 0,3 %) sur les 8 billions de dollars du marché de l’alimentation l’an dernier[18], mettent en œuvre un modèle d’affaires universellement reconnu pour être dépendant de la devise “croissance à tout prix” de nos écosystèmes et pour avoir en permanence accès à un grand nombre de capitaux d’investisseurs. La pandémie a contraint à adopter une nouvelle manière de faire ses achats alimentaires. Les acteurs de ces services de livraison à la demande ont d’ailleurs convaincu les investisseurs (à hauteur de près de 20 milliards de dollars investis l’an dernier[16]) qu’ils n’étaient pas prêts de disparaître. En termes simples, les sociétés de services de livraison à la demande :

  1. se sont établies dans des villes à forte densité de population et dont les statistiques sur les revenus sont favorables (New York ou Londres, par exemple) ;
  2. ont noué des partenariats avec des grossistes et des fournisseurs directs pour la sélection d’un assortiment de produits à offrir ;
  3. ont construit des micro-entrepôts (magasins fantômes) dans certains quartiers pour que leurs ramasseurs puissent assembler les commandes ;
  4. ont embauché des chauffeurs à temps plein pour répondre à la demande et livrer les commandes rapidement ;
  5. ont déployé tous les efforts imaginables avant et après les achats pour que les consommateurs continuent d’utiliser leur service, sans trop tenir compte des données économiques unitaires.

Distribution de chèques-cadeaux aux consommateurs pour qu’ils utilisent leur service, remises de plus de 80 % sur toutes les commandes19 ; le mantra consistant à prioriser les données économiques unitaires négatives pour stimuler la croissance est devenu l’épine dorsale de l’industrie. Pour les investisseurs, ce manque d’empathie économique a été présenté comme un investissement qui serait plus tard justifié par :

  1. un nombre accru d’utilisateurs futurs de la plateforme contribuant à la notoriété de la marque et à la réduction des coûts d’acquisition ;
  2. une augmentation du rythme des dépenses des consommateurs qui adoptent la livraison sur demande dans leur vie quotidienne ;
  3. des volumes de commande moyens plus élevés à l’avenir entraînant une hausse des revenus. Qu’il s’agisse de Fridge No More avec une perte moyenne de 78 $ pour chaque nouveau client acquis après 10 mois d’exploitation20 ou de JOKR avec le double, à 159 $17, cette tendance déficitaire pour stimuler la croissance a fait en sorte de normaliser les taux d’utilisation de la trésorerie records et de désigner le capital-risque comme bouc émissaire pour subventionner le manque de rentabilité et de valeur commerciale fondamentale du modèle.

Alors, comment un secteur dont les fondamentaux commerciaux sont aussi à contre-courant a-t-il réussi à attirer du capital-investissement de haut niveau et à susciter un tel engouement sur le marché dans les deux dernières années ?

  1. Disponibilité massive du capital : le modèle de livraison sur demande a proliféré au cours des deux dernières années et de nombreuses entreprises ont vu le jour. Or, elles l’ont fait à un moment où les investisseurs avaient un plus grand appétit pour le risque, le capital était traité comme une marchandise et la méthode d’évaluation privée s’est détraquée – en raison de l’arrivée massive de capitaux croisés sur les marchés à risque.
  2. Mesures de confinement liées à la pandémie : dans le contexte des mesures initiales de confinement à grande échelle prises pour contrer la COVID-19, la livraison s’est implantée comme solution de secours et la demande a prospéré. Ainsi, le secteur de la livraison sur demande a bénéficié d’une forte visibilité. Les restrictions strictes imposées par les gouvernements ont engendré une hausse en glissement annuel de 50 % de la livraison à la clientèle et de 41 %21 de la livraison instantanée.
  3. Production d’une “richesse” transitoire : les gouvernements ont injecté des milliers de milliards de dollars dans l’économie par l’entremise de programmes d’aide liés à la pandémie et ont procédé à un assouplissement quantitatif sans précédent. Par conséquent, les consommateurs sont devenus “plus riches”. Ces fonds étaient destinés à des entreprises productives et devaient servir à la création subséquente d’emplois, mais les consommateurs et les investisseurs les ont affectés à la constitution d’actifs bouillonnants, la livraison sur demande en étant un excellent exemple.

En ce qui concerne l’avenir de la livraison sur demande, les fondateurs et les investisseurs seront confrontés à de nombreux obstacles. À mesure que les investisseurs publics et privés mettent en œuvre une philosophie de placement fondée sur l’efficience du capital et les flux de trésorerie disponibles (voir la partie 2), les entreprises gourmandes en liquidités voient leur popularité diminuer et sont contraintes de changer leur modèle (si elles en sont capables). Déjà en 2022, ce fut la fin pour bon nombre d’entre elles. Fridge No More, Buyk et 1520 ont toutes les trois cessé leurs activités à cause d’un manque de financement brutal et inattendu. Par ailleurs, il n’est pas viable de modéliser les chiffres de croissance à partir d’une année de confinement.

Lorsque la consommation commencera à s’essouffler, les acteurs de la livraison sur demande devront trouver un nouveau levier autre que l’offre d’épiceries gratuites ou de rabais de masse pour appâter les clients. La “conquête du marché” ne pourra être une stratégie de croissance que pour ceux qui sont en mesure de l’appliquer efficacement. Fait encore plus important, les intervenants du milieu devront prouver leur modèle pour rester en vie. Alors qu’un épicier typique réalise une marge nette positive d’environ 4 % sur les achats effectués en magasin, ce pourcentage chute à -13 % lorsqu’il doit y avoir ramassage, emballage et livraison[23]. Ayant établi une base de clients fondée sur l’offre de rabais coûteux, les entreprises de livraison sur demande peuvent se trouver dans l’incapacité de compenser les dollars d’acquisition par des augmentations de prix sans subir une désaffection importante, d’autant plus que l’inflation continue de peser sur le pouvoir d’achat des consommateurs.

Comme Uber a établi un précédent acceptable faussé, ayant été en mesure de mobiliser plus de 25 milliards de dollars de capitaux privés avant même de générer des liquidités[24], le secteur de la livraison sur demande fera l’objet d’une consolidation de masse et de nouvelles fermetures d’entreprises sont à prévoir. De plus, les investisseurs se rendront compte que le fait de commander un seul avocat à livrer en moins de 15 minutes n’est peut-être pas aussi lucratif qu’ils le pensaient.

Infonuagique

Si les deux thèmes précédents concernaient des modèles d’affaires basés sur un environnement macroéconomique anormalement favorable et une affluence de capitaux privés, le marché de l’infonuagique a connu une croissance fondamentalement différente. En effet, il s’agit d’équiper les entreprises, à toutes les étapes et dans tous les secteurs, d’une technologie novatrice conçue pour i) accroître l’impact en plaçant les clients et les données au centre de leurs activités respectives et ii) favoriser la transition de notre monde vers une domination numérique. Le modèle de l’infonuagique s’est avéré être l’un des changements de paradigme les plus importants depuis l’invention d’Internet, et compte tenu de l’imprévisibilité du marché haussier, il n’a fait que renforcer son potentiel à long terme.

D’ici la fin de 2022, les dépenses mondiales des utilisateurs finaux pour les services infonuagiques publics devraient atteindre 494 milliards de dollars, soit une hausse de 20 % par rapport au record de 410 milliards de dollars enregistré en 2021. On s’attend à ce qu’elles grimpent à 600 milliards de dollars d’ici 2023[25]. Ce sont les segments des infrastructures-services (IaaS) et des plateformes-services (PaaS) qui devraient connaître la plus forte croissance annuelle des dépenses des utilisateurs finaux : plus de 30 % et de 26 % respectivement[25]. Comme prévu, le segment des logiciels-services (SaaS) conserve confortablement la plus grande part du marché mondial, à 177 milliards de dollars (ou 35 %)[25]. Comme les entreprises ont été forcées de mettre en œuvre ou d’accélérer leurs plans de transformation numérique en 2021, tant le marché public que le marché privé ont prospéré. Plus précisément, au-delà de 900 entreprises en démarrage du secteur des services infonuagiques privés ont amassé une somme supérieure à 21,5 milliards de dollars à l’échelle mondiale. En outre, la capitalisation totale du marché des services infonuagiques publics a atteint de nouveaux sommets, à 2 700 milliards de dollars en novembre 2021[26].

Au cours de la dernière décennie, les entreprises du monde entier ont d’abord été initiées au “nuage” par les pionniers des applications logicielles qui définissaient autrefois la catégorie (HubSpot, Salesforce, Slack, Adobe et Dropbox), d’où l’adoption généralisée du modèle de prestation SaaS. De même, les fournisseurs d’infrastructures ont utilisé le nuage pour offrir aux entreprises plus d’agilité, de souplesse et de rentabilité en ce qui a trait à l’hébergement de données. Au lieu des entrepôts de données physiques et des équipes de soutien sur place auparavant nécessaires, on pouvait désormais faire appel à une infrastructure numérique infonuagique, élastique et évolutive, grâce à Amazon Web Services (AWS), à Microsoft Azure et à Google Cloud. Bien que l’infonuagique ait gagné une plus grande part des budgets de TI au fil des ans, la pandémie a servi de catalyseur pour accélérer encore plus l’innovation numérique et l’adoption des services infonuagiques.

Au début de 2022, seulement 24 % de la charge de travail des applications à l’échelle mondiale résidait dans le nuage public[27]. D’ici la fin de 2024, ce pourcentage devrait être multiplié par 1,5 pour s’établir à 37 %, un phénomène qui répond aux critères de la célèbre citation “deux ans en deux mois” de Satya Nadella à propos de la transformation numérique[28]. Si 10 ans ont été nécessaires pour atteindre 24 %, il en faudra seulement deux, après la pandémie, pour enregistrer un bond de 13 %. Qu’il s’agisse de travail et d’école à distance, de collaboration et de gestion de l’expérience, de vente et de service à la clientèle, ou encore de cybersécurité et d’infrastructures, les entreprises auront besoin de l’infonuagique et des technologies connexes pour traverser l’ère qui vient. Avec des marges supérieures de plus de 19 % pour les entreprises qui migrent vers le nuage comparativement aux entités comparables d’un même secteur[29], la croissance proviendra des nouvelles migrations et des chefs de l’information existants qui cherchent à augmenter leurs services infonuagiques. Et dans l’actuel contexte inflationniste, la capacité du nuage d’atténuer les effets d’une hausse des coûts de base ne fera que renforcer les raisons d’adopter cette technologie.

Selon un rapport de Morgan Stanley Research, les dirigeants principaux de l’information (DPI) prévoient augmenter leurs budgets TI dans trois domaines essentiels : l’infonuagique (+12,3 %), la transformation numérique (+9,7 %) et la cybersécurité (+9,7 %). De plus, les DPI ont signalé que ces trois secteurs sont les flux TI les plus sûrs en cas d’aggravation du contexte économique. Que nous indique cette situation ? Premièrement, elle souligne la tendance permanente à l’adoption de l’infonuagique. Et surtout, elle met en évidence la demande stable et la résistance globale de la technologie de l’infonuagique et de ses fournisseurs, qui sont reconnus comme des « affaires de base » ; si ces affaires étaient retirées, les conséquences seraient néfastes pour l’ensemble de la société.

En 2022, un mandat de réduction des coûts a été imposé à tout notre écosystème technologique. Les chefs des finances ont dû regrouper leurs dépenses d’exploitation, y compris celles de leurs partenaires technologiques. Bien que les prévisions de difficultés considérables se soient répandues dans le secteur de la technologie publique, les sociétés d’infonuagique ont affiché une situation légèrement différente au cours de la période de publication des résultats du deuxième trimestre de l’année 2022 : 88 % des sociétés ont dépassé le consensus et ont maintenu un taux médian de rétention des revenus nets de 120 %. Qu’il s’agisse de Gitlab, qui a constaté que “le contexte actuel ne ralentit pas les décisions des clients et n’allonge pas nos cycles de vente[32]” ou de MongoDB, qui a enregistré “un nombre record d’ajouts nets de clients de vente directe[30]“, les fournisseurs d’infonuagique se sont révélés uniques dans leur capacité à générer de nouvelles affaires tout en élargissant progressivement les relations avec les clients existants, alors que la plupart des entreprises technologiques connaissent exactement le contraire.

Or, le facteur le plus marquant qui différencie les sociétés d’infonuagique des autres sociétés technologiques existantes réside sans doute dans leur capacité à fonctionner et à croître sans s’appuyer sur la croissance à tout prix de nos écosystèmes. Les deux principaux fournisseurs d’infrastructure infonuagique, AWS et Azure (intégrés à l’ensemble du segment de l’infonuagique intelligente Microsoft), ont terminé le troisième trimestre de 2022 avec des revenus annualisés respectifs de 82 milliards de dollars et de 48 milliards de dollars, soit une croissance annuelle de 28 % chacun. Par ailleurs, ils ont réussi à produire un résultat d’exploitation de 17,6 milliards de dollars et de 15,7 milliards de dollars, respectivement[30,31].

En ce qui concerne les applications logicielles, il y a de nombreux cas de sociétés qui ont généré de fortes marges de flux de trésorerie disponible au deuxième trimestre de 2022 (elles n’ont pas toutes déclaré les résultats du troisième trimestre) dans diverses catégories d’infonuagique, notamment Adobe (41 %), Zendesk (40 %), ZoomInfo (32 %), Atlassian (31 %), Dropbox (33 %) et Workday (21 %)[31]. Et au risque d’être pointilleux, on constate que la marge médiane du flux de trésorerie disponible pour toutes les sociétés de nuage public à la fin du deuxième trimestre de 2022 était de 0 %, ce qui témoigne de leur capacité à équilibrer une forte croissance et une allocation de capital rigoureuse. Enfin, les infrastructures de données infonuagiques et de sécurité constituent un segment probablement peu familier pour la plupart des gens, compte tenu de la croissance explosive très récente de ce secteur. Bien que les sociétés de ce segment soient présentes depuis des années, leur profil financier est tout aussi rare que celui de l’infrastructure infonuagique ; elles affichent un revenu annualisé de plusieurs centaines de millions de dollars, une courbe de taux de croissance en S accentuée au début et des marges de flux de trésorerie établies. Que ce soit Crowdstrike, qui a clôturé le deuxième trimestre de l’année 2022 avec un revenu total de 535 millions de dollars, une croissance annualisée de 58 % et une marge du flux de trésorerie disponible de 25 %, ou DataDog, dont le revenu total s’élevait à 435 millions de dollars, avec une croissance annualisée de 61 % et une marge du flux de trésorerie disponible de 15 % au troisième trimestre de l’année 2022[32], ce segment est prêt à renforcer l’innovation dans le domaine de l’infonuagique (et le rendement pour les investisseurs) au cours de la prochaine décennie.

Bien que le marché de l’infonuagique ait été moins touché par l’imprévisibilité du marché haussier, divers facteurs macroéconomiques et de marché ont eu une incidence sur l’ensemble du secteur.

  1. Conséquences des devises : la Fed ayant récemment relevé les taux de 75 points de base pour les porter à 4,00 %, les investisseurs étrangers continuent d’accroître leurs placements en obligations à rendement élevé aux États-Unis, d’autant plus que la Banque centrale européenne (BCE) et la Banque du Japon appliquent une politique monétaire plus souple. De ce fait, la demande pour le billet vert américain est montée en flèche. Même si les investisseurs étrangers soutiennent la croissance économique, la vigueur de la monnaie américaine nuit à la valeur des revenus réalisés à l’étranger (les revenus perdent de leur valeur une fois convertis et déclarés en dollars US). Et malheureusement, étant donné que les logiciels sont indépendants des frontières, le resserrement monétaire brutal de la Fed a eu un impact excessif sur le secteur des technologies. Goldman Sachs a indiqué que 60 % du chiffre d’affaires de toutes les sociétés de technologie de l’indice S&P provenaient des marchés internationaux en 2021, contre seulement 29 % pour l’ensemble des autres sociétés de l’indice. Ainsi, la forte appréciation du dollar américain devrait peser davantage sur les bénéfices tirés des logiciels dans les trimestres à venir.
  2. Conflits géopolitiques : même si des attaques records par déni de service distribué (DDoS) et de cybersécurité ont vu le jour en Ukraine dès son invasion par la Russie, la cyberguerre ne s’est pas limitée aux mêmes frontières géographiques que le conflit lui-même. Au premier trimestre de 2022, le nombre d’attaques DDoS à l’échelle mondiale a atteint un sommet historique[33], et plus d’un quart des entreprises qui ont participé à une enquête mondiale de Gartner ont affirmé avoir pris des mesures en matière de cybersécurité en réponse à l’invasion de la Russie[34]. Dans la région Europe, Moyen-Orient et Afrique (EMOA), on a constaté une augmentation de plus de 220 % des cyberattaques par rapport aux quatre années précédentes et, en conséquence, la BCE a demandé à toutes les banques européennes de renforcer leurs capacités de cyberdéfense[35]. Pour l’avenir, à mesure que les entreprises accélèrent leurs migrations vers l’infonuagique et que les cyberattaques deviennent de plus en plus fréquentes et complexes, la cybersécurité gagnera en importance en tant que priorité pour les dirigeants.
  3. Modèles de travail hybrides : l’application la plus évidente de la technologie infonuagique est attribuable à la transition immédiate vers des modèles de travail à distance et hybrides. Selon 81 % des entreprises, la pandémie a accéléré leur mise en œuvre de l’infonuagique[36] et, comme le marché a tiré des leçons de la grande résignation précédente lors de l’imprévisibilité du marché haussier, les modèles de travail flexibles ne sont pas prêts de disparaître. Pour les entreprises qui veulent rester un concurrent de premier plan pour les meilleurs talents, il sera primordial d’investir continuellement dans l’expérience et dans la facilitation du télétravail.

Bien que les perspectives du secteur de l’infonuagique demeurent favorables dans l’ensemble, les sociétés de l’infonuagique s’adapteront différemment à un contexte économique normalisé en fonction des répercussions qu’elles ont subies pendant l’imprévisibilité du marché haussier, que ce soit sous forme de croissance par choc, par étape ou permanente.
Les sociétés de l’infonuagique qui ont connu une croissance par choc ont vu leurs marchés potentiels gonfler et ont enregistré des taux d’acquisition de la clientèle anormalement élevés ; à l’avenir, elles demeureront exposées à une forte perte de clientèle et à une contraction des revenus. Citons l’exemple de Zoom, dont la capitalisation boursière culminait à 66 milliards de dollars à la fin de 2020, contre seulement 24 milliards de dollars lors de la rédaction du présent document43. Un autre exemple est celui de l’entreprise Olo, dont la capitalisation boursière ne représente actuellement qu’un cinquième de son sommet d’août 202144 et dont les prévisions générales du revenu pour l’exercice 2023 ont subi le changement le plus défavorable à la suite de la publication de ses résultats du deuxième trimestre 2022 (-12 %).

Les sociétés de l’infonuagique qui ont connu une croissance par étape ont vu leur chiffre d’affaires augmenter de façon anormale en raison de l’avancement des cycles d’achat des clients face à la pandémie, mais à l’avenir, elles prévoient des volumes normalisés, à un niveau d’avant la pandémie. Shopify est un excellent exemple de ce type d’entreprise : elle a bénéficié de l’engouement pour le commerce électronique attribuable à la pandémie, mais elle retrouve une croissance normale dans l’ensemble de ses activités principales. En outre, des sociétés comme DocuSign ou Okta, qui ont profité d’un modèle de travail à distance obligatoire, devraient voir leurs volumes se normaliser, après le retour sur le lieu de travail. La dernière catégorie d’entreprises de l’infonuagique est celle dont la demande dans leur secteur a évolué de façon permanente. Comme mentionné ci-dessus, des secteurs tels que l’infrastructure infonuagique (AWS/Azure), les données (Snowflake/DataDog) et la cybersécurité (Crowdstrike/Zscaler) devraient progresser parallèlement à la transition du monde vers la domination numérique et tirer profit des facteurs favorables de l’infonuagique.

Conclusion

Il ne fait aucun doute que l’environnement macroéconomique de ces deux dernières années a joué un rôle de premier plan dans l’épanouissement de tous les secteurs de notre écosystème technologique, dans la recherche de capitaux et dans l’accélération de leur propre version du plan de « croissance à tout prix ». Cependant, à l’avenir, alors que les investisseurs et le marché commencent à accorder la priorité à des paramètres autres que la croissance du chiffre d’affaires lors de l’évaluation des entreprises potentielles et de la valorisation, il est clair que le secteur des technologies adoptera un nouveau plan. La nouvelle ère des entreprises générationnelles (et non des licornes) ne reposera plus sur l’ancien plan de match de 2013. Ces entreprises seront plutôt créées selon un plan axé sur une croissance efficace du capital.

References

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